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Rétro-test du Bozak CMA 10-2DL et histoire des mixeurs « rotary »

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Petit retour en arrière sur un appareil rare qui a marqué l’histoire de la musique, de sa création à sa diffusion. Cette semaine, nous nous penchons sur le premier mixeur pour DJ disponible dans le commerce, le précurseur CMA 10-2DL de la marque américaine Bozak.

Cette semaine nous inau­gu­rons une série qui mettra en avant, dans chacun de ses articles, un appa­reil impor­tant dans l’his­toire de la musique, qu’il s’agisse de sa créa­tion, son enre­gis­tre­ment ou sa diffu­sion. Il s’agira d’al­lier un éclai­rage histo­rique, qui permet­tra de bien comprendre le carac­tère influent de cet appa­reil (ou du type d’ap­pa­reils auquel il appar­tient), à une descrip­tion complète et une analyse de ses perfor­mances, en se fondant sur un exem­plaire réel qui se trouve, pour un temps, entre mes mains.

Vous le compre­nez peut-être déjà, cette initia­tive est née du fait que mon acti­vité non-AFienne m’amène régu­liè­re­ment à travailler sur des appa­reils audio pro « vintage », ce qui me donne l’op­por­tu­nité d’abor­der leur fonc­tion­ne­ment de manière empi­rique, et de consta­ter leurs spéci­fi­ci­tés sonores réelles (par l’usage mais aussi par la mesure). Cette série d’ar­ticles, en forme de Rétro­Test comme nous en a récem­ment proposé synth­wal­ker, nous permet­tra de reve­nir régu­liè­re­ment sur des appa­reils qui, s’ils ne sont pas récents, gardent une certaine forme d’actua­lité par l’usage pérenne qu’en font aussi bien les profes­sion­nels que les amateurs.

IMG 20230614 110554Cette semaine, nous commençons donc par le mixeur CMA-10–2DL de Bozak, le tout premier mixeur stéréo pour DJ dispo­nible dans le commerce, de type « rotary », c’est-à-dire à poten­tio­mètres rota­tifs, et non pas à faders linéaires. Un appa­reil qui a été copié, cloné, réédité, et qui a inspiré aujour­d’hui la recréa­tion de nouveaux modèles – tous très haut-de-gamme, par ailleurs – de mixeurs « rotary ».

Descrip­tion rapide

Le CMA-10–2DL est un mixeur à quatre entrées stéréo + deux mono :

  • 2 entrées Phono (stéréo)
  • 2 entrées Aux (stéréo)
  • 2 entrées Micro (mono)
  • IMG 20230629 095456
  • IMG 20230629 095502

 

IMG 20230629 095507Chaque canal béné­fi­cie de son contrôle de balance et d’un contrôle de gain. Les six entrées (stéréo et mono) sont ensuite sommées en deux canaux (stéréo), qui passent ensuite par un étage d’éga­li­sa­tion deux bandes (basse et aigu), avec réglages indé­pen­dants pour les voies gauche et droite.

Le CMA-10–2DL possède trois sorties : 

  • une sortie Mains, de niveau ligne, dispo­nible au format RCA (cinch) ou XLR. La sortie sur prise XLR n’est pas symé­tri­sée. Le réglage géné­ral se fait par un poten­tio­mètre Master Gain.
  • une sortie Tape Out, qui reprend le signal juste après sa somma­tion, avant l’étage d’éga­li­sa­tion. 
  • une sortie Moni­tor, sortie casque située à l’avant de l’ap­pa­reil, conçue pour pouvoir suppor­ter un casque dont l’im­pé­dance peut aller jusqu’à 600 ohms.

La sortie Tape Out est la plus simple, le niveau rela­tif de chaque source y est seule­ment réglé grâce aux poten­tio­mètres de gains d’en­trée.

La sortie Mains ajoute en outre le passage par un circuit d’éga­li­sa­tion, puis par un ampli­fi­ca­teur de niveau ligne. Le volume du signal, en sortie Mains est réglé par le contrôle Master Gain

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La sortie Moni­tor permet d’écou­ter soit le programme (option PRGM) diffusé par la sortie Mains (le signal est alors prélevé juste avant le poten­tio­mètre Master Gain et il n’est pas affecté par celui-ci) ou une seule source indé­pen­dam­ment du mix (option CUE), sélec­tion­née grâce au commu­ta­teur rota­tif. Le niveau de sortie est toujours réglée grâce au poten­tio­mètre Moni­tor Level.

NB : contrai­re­ment à ce que laisse entendre les noms « gain » et « master gain », aucun des réglages de niveau acces­sibles en façade ne sont des réglages de gain. Il s’agit au contraire d’at­té­nua­teur de niveau, le gain étant fixé par la valeur des compo­sants employés dans les circuits RIAA, Micro et Ligne, puis atté­nué grâce à ces poten­tio­mètres « gain » ou « master gain ». Toute­fois, pour rester cohé­rent avec l’ap­pa­reil, on conti­nuera de les nommer selon la nomen­cla­ture employée sur la façade.

Avant d’ana­ly­ser l’ap­pa­reil plus en profon­deur, reve­nons rapi­de­ment en arrière sur une marque bien connue aux USA, mais assez peu expor­tée à travers le monde, la firme Bozak, et sur le parcours de son fonda­teur, Rudy Bozak.

Un bout d’his­toire

Rudolph Bozak, né en 1910, était un ingé­nieur spécia­lisé dans les domaines de l’acous­tique et de l’élec­tro­nique. Son parcours est marqué par quelques dates impor­tantes : 

1933 – dès la fin de ses études, Rudy Bozak travaille pour Allen-Brad­ley, impor­tant fabriquant de compo­sants élec­tro­niques. Il sera long­temps fidèle à cette marque, en faisant appel à elle pour ses propres réali­sa­tions.

static1.squarespace1935 – Il travaille pour Cinau­da­graph, et conçoit pour eux un haut parleur à exci­ta­tion pour la trans­mis­sion des basses, d’un diamètre de 27 pouces (68 centi­mètres, ci-contre).

Dans les années 1940, il travaille pour l’ar­mée et déve­loppe des alimen­ta­tions à haute tension pour les radars.

1948 : il conçoit des haut-parleurs pour la marque Wurlit­zer.

1950 : il est engagé par le fabri­cant d’am­pli­fi­ca­teurs McIn­tosh Labo­ra­tory. En 1952, il parti­cipe à la créa­tion de la première enceinte McIn­tosh, la F100, enceinte trois voies avec quatre haut-parleurs de grave, un médium et quatre twee­ters. Il n’exis­te­rait qu’une centaine d’exem­plaire de la F100, et aucune autre enceinte ne sera conçue avant les années 1970.

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McIn­tosh F100 Spea­ker System

À la même époque il fonde sa propre entre­prise, Bozak Loud­spea­kers.

Capture d’écran 2023-07-07 à 12.30.45Au sein de cette entre­prise, il déve­loppe les trois haut-parleurs phare de sa marque : le twee­ter B-200, le médium B-209 et le woofer B-199, qui seront utili­sés pour le déve­lop­pe­ment de diverses enceintes, toutes axées sur un prin­cipe de multi­pli­ca­tion des HPs par voie : 2, 3 ou 4 woofers, jusqu’à 8 twee­ters, etc.

Ces enceintes sont rela­ti­ve­ment rares en Europe, datant d’une période où les expor­ta­tions n’étaient pas globa­li­sées, et où l’im­port et la vente d’en­ceintes qui mesu­raient souvent la taille d’un petit réfri­gé­ra­teur, vendues à un prix élevé, n’était pas une donnée évidente.

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Dès les années 1960, Rudy Bozak colla­bore avec les Labo­ra­toires C/M (de leurs fonda­teurs Wayne Chou et Nick Morris, ce sont eux le « CM » de CMA) pour la fabri­ca­tion de mixers, d’abord mono (Bozak CMA-6–1 and CMA-10–1) puis stéréo avec le CMA-10–2DL.

1447034540-2442075827Les mixers Bozak connaî­tront de nombreuses modi­fi­ca­tions, ajouts d’op­tions, déve­lop­pe­ment de nouvelles fonc­tions, mais cette première itéra­tion est surtout conçue comme une varia­tion sur un modèle de préam­pli exis­tant, le Bozak 919, dont il reprend les cartes Phono, et le système « Cue », permet­tant de moni­to­rer au casque n’im­porte qu’elle entrée indé­pen­dam­ment de la sortie Mains. Pensé pour l’au­dio pro, ce mixer n’est pas conçu diffé­rem­ment d’un appa­reil Hi-Fi, la distinc­tion n’ayant pas de sens pour cette géné­ra­tion d’in­gé­nieur.

Le CMA-10–2DL conti­nuera d’être produit par la firme Bozak jusqu’à la mort de son fonda­teur en 1982, puis encore quelques années grâce au travail de deux ingé­nieurs de l’en­tre­prise, Buzzy Beck et Paul Hammar­lund.

Ce premier modèle de mixeur est à l’ori­gine de ce que l’on nomme la forme « rotary » (en réfé­rence au type de poten­tio­mètres utili­sés) de mixeurs pour DJ. Le CMA-10–2DL fut copié par d’autres marques, qui lui ajou­te­ront de nouvelles fonc­tions… Mais nous revien­drons dans la dernière partie sur la suite de l’his­toire. Pour l’ins­tant, explo­rons l’ap­pa­reil en lui-même.

Descrip­tion détaillée (et mesu­rée)

Quelques spéci­fi­ca­tions géné­rales avant d’en­trer dans les détails. Sur la sortie Mains : 

  • L’ap­pa­reil four­nit au maxi­mum 24,5 dB de gain mesuré (les docu­ments Bozak indique 26 dB)
  • La diapho­nie est de –61,3 dB
  • Le rapport signal bruit est de 84,3 dB
  • La plage dyna­mique est de 95,7 dB (pondé­ra­tion A)

On a donc un appa­reil qui possède des résul­tats très convain­cants (en gardant en tête qu’il a été construit autour de 1971 et qu’il est entiè­re­ment analo­gique).

On revien­dra rapi­de­ment aux perfor­mances mesu­rées, mais pour l’ins­tant jetons un oeil dans l’ap­pa­reil :

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Le premier point remarquable, c’est que le CMA-10–2DL est modu­laire, étant entiè­re­ment construit sur cartes enfi­chables, venant se connec­ter à une carte mère. La topo­lo­gie interne est très ration­nelle : à droite, l’ali­men­ta­tion, avec un unique circuit imprimé placé verti­ca­le­ment contre la paroi laté­rale interne. L’ali­men­ta­tion contient un étage de régu­la­tion – qui génère une tension de 40 V CC – et un circuit de commande d’un relais, qui a pour fonc­tion de couper l’ar­ri­vée du signal aux sorties Mains et Moni­tor (système de protec­tion des appa­reils en suite de chaîne, au cas où le CMA-10–2DL enver­rait du courant continu en sortie, par exemple). Le relais se déclenche à l’al­lu­mage après quelques secondes, dès qu’il y a stabi­li­sa­tion de l’ali­men­ta­tion.

À partir de là, on suit le circuit de la sortie vers l’en­trée : 

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De gauche à droite : RIAA, Micro, Somma­tion et EQ

Le plus à gauche, juste derrière les contrôles Master Gain et Moni­tor Level, on voit deux cartes simi­laires, faci­le­ment recon­nais­sables grâce à leurs quatre tran­sis­tors montés sur radia­teurs. Il s’agit des ampli­fi­ca­teurs de sortie. Chaque carte contient deux circuits tota­le­ment simi­laires : l’un pour les sorties Mains et l’autre pour la sortie casque. Une carte est dédiée à la voie gauche, l’autre à la droite.

IMG 20230526 165735Vient ensuite la carte d’éga­li­sa­tion, qui est en fait sépa­rée en deux éléments : les circuit actifs (droite et gauche) sur une seule carte enfi­chable, et les circuits passifs (droite et gauche) sur deux circuits impri­més instal­lés tout en haut de la façade avant (avec, pour chacun, deux poten­tio­mètres – bass et treble en façade).

Il s’agit d’un circuit très proche du célèbre modèle Baxan­dall (à quelques diffé­rences mineures près), c’est-à-dire un circuit d’éga­li­sa­tion passif à deux contrôles (sur les cartes en façades), inté­gré dans la boucle de contre-réac­tion d’un circuit actif d’am­pli­fi­ca­tion (sur la carte enfi­chable).

IMG 20230614 100407Si l’on conti­nue toujours plus à gauche, on trouve la carte de somma­tion, puis deux cartes de préam­pli Micro, chacune accom­pa­gnée d’un trans­for­ma­teur d’en­trée de marque Beyer­dy­na­mic offrant un rapport de 1:15, et pouvant s’adap­ter à des impé­dances source aussi basse que 200 ohms. Il est possible d’at­taquer le primaire du trans­for­ma­teur avec un signal symé­trisé ou non.

Les entrées Aux n’ont pas de cartes, sur ce modèle, mais un ampli ligne option­nel était distri­bué par la marque.

Pour finir, on arrive aux deux cartes RIAA pour les entrées Phono, avec l’im­pé­dance d’en­trée clas­sique (47 K ohms) et une sensi­bi­lité max. de 100 mV (pour réfé­rence, une cellule actuelle, axée DJing, sortira entre 6 et 9 mV en moyenne).

Cette fabri­ca­tion sur carte présen­tait divers inté­rêts, en parti­cu­lier celui d’une faci­lité de montage, de répa­ra­tion, ou encore de trans­for­ma­tion des circuits au travers des années de produc­tion.

Pour finir cette présen­ta­tion, faisons un tour par les contrôles : derrière la façade avant on trouve des poten­tio­mètres Alps de type RK47, qui ont été instal­lés dans notre exem­plaire pour rempla­cer les poten­tio­mètres d’ori­gine, de marque Allen Brad­ley (de la série « Type J »). Pour infor­ma­tion, ces poten­tio­mètres Alps avaient déjà été adop­tés par Bozak après quelques années de fabri­ca­tion du CMA-10–2DL, pour rempla­cer les « Type J » utili­sés origi­nel­le­ment (la seule diffé­rence avec ceux instal­lés dans cet appa­reil :  les RK47 instal­lés par Bozak était fabriqués spécia­le­ment pour la marque améri­caine, suivant ses spéci­fi­ca­tions parti­cu­lières). Les RK47 avait été sélec­tionné pour leur robus­tesse méca­nique : parfait donc pour un usage en DJing. Sur la photo ci-dessous, on peut voir un Alps, à gauche, et deux modèles Allen Brad­ley à droite :

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Passons main­te­nant aux mesures : 

En envoyant un signal dans l’entrée Aux, en mesu­rant en sortie Mains, on obtient les résul­tats suivants : 

Relative Level (1,00000 kHz)

THD+N Ratio

Dévia­tion :±0,022 dB

THD+N : 0,04 % @ 1 kHz

Autant dire que c’est excellent ! La rigueur dans le choix des compo­sants et la simpli­cité des circuits donnent des fruits.

Entrée Phono, sortie Mains (injec­tion d’un balayage 20 Hz – 20 kHz avec correc­tion RIAA inver­sée)

Phono Relative Level (1,00000 kHz)

Phono THD+N Ratio

Dévia­tion : ±0,661 dB

THD+N : 0,15 % @ 1 kHz

On peut s’y attendre, c’est un tout petit peu moins bien, mais ça reste très bon. On notera que la dévia­tion du filtre RIAA reste infé­rieure à 1 dB, donc proba­ble­ment imper­cep­tible.

Entrée Aux, Sortie Moni­tor (casque) : 

HP Relative Level (1,00000 kHz)

HP THD+N Ratio

Dévia­tion : ±0,391 dB

THD+N : 0,02 % @ 1 kHz

Là aussi, les résul­tats parlent d’eux-mêmes. On ajou­tera que l’am­pli casque four­nit 28 dB de gain (comme annoncé par le construc­teur), avec une diapho­nie de –87,9 dB et un rapport S/B de 78,7 dB.

Pour finir, voici les courbes d’éga­li­sa­tion : 

Tone Curves

Tone Curves THD+N

Gain d’EQ : ± 12,5 dB @ 20 Hz et 20 kHz, avec une fréquence centrale de 800 Hz.

THD+N : reste toujours infé­rieure à 0,2 % @ 20 Hz et 20 kHz, même avec 12,5 dB de boost.

Pourquoi un mixeur « rotary » aujour­d’hui ?

Si avant le CMA-10–2DL, certains DJ et certains clubs commençaient à possé­der des mixeurs réali­sés spécia­le­ment pour eux (et souvent par eux !), la machine créée par Bozak fut une révo­lu­tion : d’un point de vue de son format (rackable, au format 3U), elle était faite pour s’in­té­grer dans une norme physique établie ; produite indus­triel­le­ment, se diffu­sant rapi­de­ment, elle permet­tait de stan­dar­di­ser la pratique du DJing. Après l’ar­rêt de sa produc­tion, d’autres marques produi­sirent leur propre version de ce mixeur, en respec­tant large­ment la dispo­si­tion des contrôles, et le format 3U : Urei et son Model 1620 (produit à partir de 1983), Rane avec le MP-2016… Mais les modèles à faders supplan­tèrent rapi­de­ment les « rotary », à partir du milieu des années 1980, tout parti­cu­liè­re­ment grâce à leur vitesse d’exé­cu­tion (les faders glissent beau­coup plus vite, et le geste est en lui-même plus simple) et par l’ajout d’une fonc­tion impor­tante : le cross­fa­der. La culture du DJing telle qu’elle se déve­lop­pera autour du hip-hop néces­si­tera l’usage d’ap­pa­reil permet­tant un contrôle virtuose des effets, ce qui est beau­coup plus diffi­cile à réali­ser avec des poten­tio­mètres rota­tifs…

e-s-djr-400-53796Toute­fois, depuis le début du XXIème siècle, plusieurs construc­teurs ont (re)lancés des modèles de mixeurs « rotary », en premier lieu la marque française E&S, avec son DJR400 conçu par Jérôme Barbé, en colla­bo­ra­tion avec DJ Deep : petit et léger, donc porta­tif, avec des compo­sants robustes et un circuit analo­gique. Aujour­d’hui, le marché des mixeurs est donc à nouveau partagé entre poten­tio­mètres linéaire et rota­tif. Les mixeurs « rotary », béné­fi­ciant d’une certaine ancien­neté et d’un certain cachet nostal­gique, sont géné­ra­le­ment nette­ment plus chers que la moyenne des mixeurs à sliders. Construits en plus petits nombres, avec un certain soin apporté à la sélec­tion des compo­sants, ils consti­tuent des appa­reils « de luxe »… Mais ne doivent pas faire oublier qu’au­cune diffé­rence sonore réelle n’existe a priori entre les deux types de poten­tio­mètre (si ceux-là sont d’une même qualité de fabri­ca­tion).

Alors d’où vient la hype ? Qu’est-ce qui peut justi­fier aujour­d’hui d’em­ployer une ergo­no­mie ancienne, et des appa­reils avec moins d’op­tions quant au trajet du signal, quant à son trai­te­ment…?

Passons sur la nostal­gie, pour mettre en avant quelques quali­tés objec­tives des mixeurs « rotary » :

  •  robus­tesse : la plupart de ces derniers sont, en grande partie, montés à la main, avec un soin parti­cu­lier apporté à leurs fini­tions. Ce sont non seule­ment de « beaux objets », mais surtout des appa­reils faits pour durer. Je vous laisse admi­rer ce RDM40 de chez Varia Instru­ments :

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  • faci­le­ment répa­rable : je pense que ce point est facile à comprendre après la présen­ta­tion du CMA-10–2DL – beau­coup de mixeurs « rotary » sont compo­sés de compo­sants discrets, non minia­tu­ri­sés, montés sur cartes, et donc faci­le­ment remplaçables. Leur circuits entiè­re­ment analo­giques sont égale­ment simples, d’où le point suivant…
  • qualité sonore : elle a son prix… mais on doit recon­naître que la plupart de ces mixeurs sonnent bien, très bien, et cela même pous­sés à très fort volume, car il béné­fi­cie d’une distor­sion souvent plus plai­sante que des mixeurs numé­riques. De plus les contrôles d’EQ et de volume sont très précis, non seule­ment par ce que les compo­sants sont de bonne qualité, mais aussi grâce au dernier point, le plus impor­tant…
  • l’er­go­no­mie : c’est là que ça passe ou ça casse, mais l’on doit recon­naître un point objec­tif très simple – les gros boutons de contrôles (gain, volume, balance et/ou EQ selon les modèles) permettent des réglages plus fins, plus faci­le­ment. C’est une consé­quence physique de leur taille. C’est parti­cu­liè­re­ment vrai sur l’EQ d’un modèle comme le DJR400. Et c’est le choix ergo­no­mique qui change tout sur ces mixeurs : la prise en main de gros contrôles, faci­li­tant les réglages fins, un contrôle accru de la course du poten­tio­mètre, tout simple­ment parce que, étant moins nombreux, ils peuvent être d’une taille plus impor­tante que sur n’im­porte quelle console Vestax, Pioneer, Mackie, Ecler…

On le comprend donc, au bout du bout, au delà de quelques argu­ments tech­niques objec­tifs, la vraie préfé­rence va se fixer sur un confort d’usage person­nel. Reste donc, pour reve­nir au début de notre article, à notre CMA-10–2DL, un appa­reil qui marqua l’avé­ne­ment d’un pan entier de l’his­toire de la musique, qui ouvrit de nombreuses portes créa­tives, et cela dans des genres divers (prin­ci­pa­le­ment la disco, la house, et les débuts du hip-hip) et qui a, en plus de ce passé remarquable, un héri­tage réel, actuel… Une façon de trans­cen­der le temps et le genres.

Merci à Arthur C. d’avoir accepté que son mixeur Bozak illustre cet article.

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